À l’occasion du 2e anniversaire de la légalisation

Samedi marque le 2e anniversaire de la légalisation du cannabis au Canada, un anniversaire dont nous devrions tous être fiers en tant que Canadiens. Lors du moment historique du 17 octobre 2018, le Canada a été le deuxième pays au monde et le premier du G20 à légaliser et à réglementer le cannabis pour l’usage adulte.

De nombreux articles seront publiés pour souligner les bons coups et les points faibles de ces deux dernières années. En tant que clinique dédiée au cannabis médical et chef de file de la recherche depuis 2014, nous avons une perspective centrée sur les soins de santé et la recherche et nous avons également connu des hauts et des bas pour nos patients et nos professionnels de la santé.

Il est important de noter qu’avant la légalisation, il était courant de penser que les cliniques de cannabis médical ne dureraient pas longtemps. Que la légalisation supprimerait le besoin d’un soutien médical spécialisé pour les patients. Ayant travaillé aux côtés des patients pendant des années, nous savions que ce ne serait pas le cas. En fait, nous avons constaté une augmentation du nombre de demandes de consultation de la part des médecins et des patients qui s’adressent eux-mêmes à nous – augmentation stimulée par la légalisation. Grâce à un meilleur accès à l’information sur le cannabis, les gens recherchent le soutien de professionnels de la santé qualifiés pour faire des choix éclairés susceptibles d’améliorer leur santé et leur bien-être.

 

La demande accrue pour nos services et le nombre croissant de rendez-vous d’une année à l’autre indiquent que le besoin de soutien médical et d’éducation des patients de la part d’une équipe de soins dédiée ne disparaîtra pas de sitôt.

 

CE QUI A BIEN FONCTIONNÉ

Moins de stigmatisation. Les patients se sentent plus à l’aise pour parler du cannabis médical avec les équipes de soins, leur famille et leurs amis. Nous avons observé une augmentation de l’intérêt des patients pour nos événements éducatifs ainsi que des médecins, des infirmières et des pharmaciens pour nos programmes de formation.

Réduction du fardeau éthique. La légalisation du cannabis a contribué à clarifier le rôle du professionnel de la santé et à réduire le fardeau éthique auquel nous étions confrontés les années précédentes, lorsque les médecins étaient les seuls gardiens de l’accès légal. Désormais, dans le cadre de la légalisation entourant le cannabis, nous pouvons nous concentrer spécifiquement sur l’admissibilité des patients aux traitements à base de cannabis médical. De plus, nous pouvons interrompre le traitement si les objectifs du traitement ou les conditions de notre programme médical ne sont pas respectés, sans craindre les problèmes juridiques si les patients décident de continuer à consommer.

La diversité des formulations de produits et des méthodes d’administration a offert davantage de possibilités aux patients et aux médecins. Au cours des deux dernières années, des extraits de cannabis, des atomiseurs (sprays) oromucosaux, des vaporisateurs et des produits topiques sont devenus disponibles, ce qui signifie que les patients sont plus susceptibles de trouver un régime de traitement qui leur convient.

Directives sur la prescription de cannabis médical mises à jour par le Collège des médecins du Québec. L’accent important est toujours mis sur la qualité des soins et la documentation, mais la recherche n’est plus obligatoire et des décisions, telles que la fréquence de suivi des patients stables, sont laissées à la discrétion des médecins. Santé Cannabis reste très impliquée dans la recherche sur le cannabis médical et tous les patients évalués et suivis à la clinique sont inscrits dans notre étude sur les données du monde réel dès leur consentement. Cependant, comme ce n’est plus une condition obligatoire, cela réduit les obstacles pour les patients et les médecins.

 

CE QUI PEUT ÊTRE AMÉLIORÉ

Plus d’éducation publique est nécessaire. Il est essentiel que la formation des professionnels de la santé soit financée et développée par le secteur public. Il existe encore beaucoup de confusion entre les règlements concernant le cannabis médical et non médical, en particulier au Québec.

Engagement en faveur de la formation des professionnels de la santé. Notre système de santé publique est une fierté pour le Canada, mais la responsabilité du gouvernement en matière de formation de nos médecins, infirmières, pharmaciens et personnel de soutien des soins de santé semble avoir été complètement occultée pendant les deux premières années de la légalisation. Le fait que les pharmaciens n’aient toujours pas de rôle défini dans le programme canadien de cannabis médical est la lacune la plus honteuse du Canada.

Amélioration des points d’accès pour les patients. L’accès n’a pas vraiment changé pour les patients au cours des deux dernières années, ils ne peuvent toujours pas faire préparer les prescriptions de cannabis médical à la pharmacie ou dans les commerces de détail. D’un côté, les points de vente de la SQDC continuent de s’étendre dans toute la province et la livraison à domicile le jour même est disponible à Montréal pour les consommateurs non médicaux. De l’autre, les patients doivent encore commander en ligne ou par téléphone directement auprès du vendeur autorisé et attendre 2 à 3 jours ouvrables pour recevoir la livraison.

Le coût du cannabis médical reste prohibitif  pour la majorité des patients qui pourraient en bénéficier. La légalisation a introduit une taxe d’accise supplémentaire en plus des taxes de vente déjà appliquées. Une certaine amélioration a été apportée en ce qui concerne l’assurance privée, mais elle reste limitée et la couverture universelle des coûts est encore loin.

L’introduction de la licence de recherche sur le cannabis, une licence qui doit être obtenue auprès de Santé Canada pour toute recherche portant sur le cannabis ou les produits à base de cannabis sur le site, a retardé les projets de recherche et augmenté la charge de travail des chercheurs cliniques. Cet obstacle entraîne des difficultés en matière de planification et de financement des projets. Sans améliorations, le Canada risque de perdre sa position de meneur mondial en matière de recherche et d’innovation des produits de cannabis et des médicaments à base de cannabinoïdes.

Les modifications apportées aux exigences d’emballage des produits avec la mise en œuvre de la Loi sur le cannabis ont créé des contraintes inutiles pour les patients, les professionnels de la santé et les producteurs et fabricants autorisés. Après vingt ans de cannabis médical au Canada, il est frustrant de constater que des décisions politiques sont encore prises sans considérer les besoins des patients en premier.

 

À l’occasion du 2e anniversaire de la légalisation

Nous sommes fiers de pratiquer la médecine et de mener à bien des recherches dans une province et un pays qui ont fait des progrès aussi impressionnants en matière de cannabis, médical et autre, au cours des deux dernières années. La légalisation est une chose pour laquelle nous avons milité depuis que nous avons ouvert nos portes en 2014, et nous célébrons cet anniversaire chaque année, sachant combien de personnes fortes ont travaillé sans relâche pour la réaliser. Il reste encore beaucoup de travail à faire, et nous envisageons avec enthousiasme les deux prochaines années et toutes celles à venir. 

 

Pour plus de perspectives sur le deuxième anniversaire de la légalisation, lisez ici (en anglais seulement)